jeudi 25 décembre 2008

MESSIE

"Il est attesté que " la parole de salut" ne vient pas aujourd'hui d'un Messie ou d'un instructeur individuel placé au-dessus du commun, mais que, dans chacun, elle est prononcée par l'esprit qui parle dans les rêves, et c'est ainsi qiue le songe devient "esprit et vie".

Etienne PERROT
extrait cahier 18, 1982

mercredi 3 décembre 2008

LA BRISE LEGERE


"E.P. Dans la journée, vous pouvez avoir plusieurs conversations, plusieurs informations et puis , quelque chose revient dans le rêve. Le rêve le reprend pour nous inviter à en voir le sens intérieur, profond. Cela nous apprend à déchiffrer la réalité diurne à ce niveau second. Si j'ai eu un accrochage de voiture et que j'en rêve la nuit, ce n'est pas une obsession de ma part, c'est que le rêve m'incite à examiner la façon dont cela s'est produit et la raison pour laquelle cela s'est fait. Le rêve nous apprend à être totalement présents à la vie, parce que, pour lui, il n'y a pas , d'une part, les grands symboles que l'on garde, et la réalité vulgaire que l'on jette à la poubelle. Non, ce n'est pas ça, tout est bon, tout est intéressant, tout est plein de signification.

Q. On sent très bien qu'il y a des rêves très importants et d'autres pas .

E.P. Oui , c'est vrai, mais il arrive aussi que les choses importantes soient dîtes d'une façon très subtiles et très fugaces. Et cela me fait penser à cette histoire de la bible où le prophète Elie sur le mont Sinai demande à Dieu de se manifester à lui. Dieu lui dit :" Mets-toi contre le rocher, ma gloire passera et tu me verras". Le prophète est donc sur la montagne et attend la manifestation de Dieu. Le tonnerre gronde et Dieu n'était pas dans le tonnerre, l'ouragan souffle et Dieu n'était pas dans l'ouragan et, à la fin de la journée, on sent le souffle d'une petite brise et Elie entend la voix de Dieu dans la brise. Il y a des grands rêves qui vous tombent dessus comme la foudre et il y en a d'autres qui sont le murmure d'une brise légère. "


Etienne PERROT
extrait cahier 20 , 1982

lundi 17 novembre 2008

TELEPATHIE


"Q. Je voudrais savoir les rapports entre le rêve et la télépathie, mais dans un sens assez large. Principalement la télépathie serait la volonté de diriger quelque chose sur quelqu'un dans un but. La question que je pose, en fait, c'est si ce but est le même but suivi par le courant interne qui n'aurait pas le même aspect volontariste et si on n'arrive pas à une sorte de télépathie, mais non volontariste.


E.P. Oui, c'est une communication naturelle, une mise en phase, mais qui n'est pas déterminée par l'individu. C'est une expérience très courante. Il m'arrive chaque semaine, et je ne suis pas le seul , de penser à quelqu'un :" Tiens, je n'ai pas de nouvelles de cette personne !" et le lendemain je reçois une lettre. Je n'ai pas déterminé le phénomène; je l'ai induit intérieurement; ce n'est pas ma volonté qui a décidé cette personne à m'écrire, mais un lien intérieur nous unit forcément, lien affectif, professionnel ou autre( dans notre travail nous ne pouvons aider que par une relation affective). A ce moment-là, une force profonde s'est trouvée activée en même temps chez l'un comme chez l'autre. On pourrait dire, en termes psychologiques plus rigoureux, que l'inconscient, qui est transpersonnel, qui est une espèce de bain d'énergie dans lequel trempent les individus et d'où émerge la conscience individuelle cet inconscient s'est trouvé activé en même temps chez l'un comme chez l'autre et a fait qu'une correspondance en forme de souvenir ou d'affect a éclos, chez moi qui attendais les nouvelles de cette personne et chez elle qui m'a écrit cette lettre. Le terme de "mise en phase" me paraît assez heureux dans ce domaine. Si l'on est placé sur une même longueur d'onde, ça résonne, effectivement, d'une façon synchrone."


Etienne PERROT

extrait cahier 17, 1982

dimanche 2 novembre 2008

LA NATURE


"Je voudrais vous citer une parole de JUNG dans ses souvenirs posthumes. Il dit :" Je ne suis pas de ceux qui croient qu'ils doivent veiller à ce que les cerises aient des queues". Il ajoute : " Je suis là contemplant ce dont la nature est capable". Vous mesurez , je pense, l'énormité d'une pareille affirmation dans notre siècle de techniques : cete foi dans la vie, cette foi dans la puissance de la nature, dans sa sagesse, dans son intelligence et dans le sens qu'elle poursuit à travers nous. Il est bien évident que si, avant de se lancer dans de grandes planifications, on se mettait un peu à l'écoute des besoins profonds d'une collectivité, des possibilités qui sont les siennes et qui correspondent à son désir intense et foncier, au lieu de se fixer des objectifs vers lesquels on tend et on veut faire tendre les membres de la collectivité les choses iraient sans doute mieux et, en tout cas, pas plus mal. C'est là ce que JUNG a défini comme attitude de "laisser advenir"". Nous retrouvons ici la grande intuition de ces opérateurs mystérieux qu'étaient les alchimistes. Ils avaient des maximes comme celle-ci: "La nature est la maîtresse, l'artiste est son serviteur", ou encore : "Toute l'oeuvre est de suivre la nature" . "

Etienne PERROT
extrait cahier 17, 1982

lundi 27 octobre 2008

LA SECHERESSE


"Q. Que faut-il penser de la sécheresse de l'âme ?

E.P. Cela dépend de l'usage qu'on en fait. La sécheresse d' âme est un genre de mort. "Sécheresse" est un terme du vocabulaire mystique. La sécheresse est une des formes de "la nuit obscure de l'esprit", donc de la mort intérieure. Aujourd'hui la sécheresse signifie souvent une distance par rapport aux sources profondes de ce qu'on appelle l'inconscient. La vie profonde, telle que la voie alchimique nous la révèle, se traduit souvent par la montée des eaux. Pour descendre du vocabulaire mystique à la description psychologique de l'âme de notre époque, nous dirons que l'âme moderne est sèche. Elle est brûlée par un feu qui n'est pas le feu d'amour, mais le feu d' une connaissance séparée de sa source, l'amour de la totalité, et qui , de ce fait, nourrit l'appétit de puissance qui accompagne le désir de savoir pour savoir, la curiosité.

Un pareil feu est, de ce fait , luciférien. Et ce n'est pas un hasard s'il a trouvé son apothéose infernale dans l'éclair qui est apparu pour la première fois dans le ciel des hommes le 16 juillet 1945 à Alamogordo, et qui, depuis, s'est multiplié.
Je vous rappelle pour mémoire, que Robert Oppenheimer avait salué cet éclair, lorsqu'il a vu naître son enfant spirituel, par les mots d'Arjuna, le compagon de Krishna, adorant son ami divin qui se transformait devant lui : " Si l'éclair de mille soleils apparaîssait dans le ciel, tel est l'éclat que répand cette âme divine." C'est le point culminant de la sécheresse. Ici elle se transforme en feu destructeur."

Etienne PERROT
extrait cahier 17 , 1982

mercredi 15 octobre 2008

LE MUR


"Naturellement, un mur qui s'écroule, c'est toujours une libération : " L'ouverture des murs de la prison." Le mur est perçu comme une prison. Il peut être une solidité. On le voit parfois comme un symbole de la pierre, au sens que nous avons contemplé tout à l'heure, mais c'est très rare. On se heurte à un mur. Il est difficile de discuter avec un enseignement magistral : le maître a toujours raison. Mais il peut y avoir, si l'on perce la carapace de l'autorité, de la volonté, de l'affirmation de puissance, on peut y trouver autre chose. C'est le cas par exemple des institutions religieuses. Une institution religieuse se forme a partir d'un mouvement de libération , d'une expérience libératrice. A la base de l'église chrétienne, il y a le christ, l'effusion de l'esprit sur les apôtres à la pentecôte, la propagation de la Bonne Nouvelle, de la libération et de l'amour. et puis à l'arrivée, disons, pas à l'arrivée, mais à l'apogée, qu'est-ce qu'il y a eu ? Il y a eu la lutte du sacerdoce et de l'empire, les papes souverains de l'occident , l'inquisition et les hérétiques détruits au nom de l'amour. ça c'est le mur. Mais à l'intérieur de ce mur, il y avait des pierres noires que représentaient les mouvements mystiques du moyen-âge qui avaient tant de mal à se faire admettre et à survivre au sein de l'orthodoxie."

Etienne PERROT
extrait cahier 22 , 1983

mercredi 1 octobre 2008

LES MERITES


"Q. (responsabilité de l'écrivain, nécessité d'expliciter l'enseignement)

E.P.
Je le sais, Madame, toute parole, et tout écrit à plus forte raison, s'exposent aux déformations, aux récupérations. Il m'est arrivé de penser, de dire que l'écrit, un écrit profond, intime, sérieux, livré par son auteur à la publication est une prostitution, parce qu'il se livre absolument sans défense, sans aucune possibilité de recours, à toutes les interprétations possibles.
Vious voyez ce qu'on a fait de tous les grands livres, que ce soit l'évangile, que ce soit Marx, que ce soit aujourd'hui, Jung. Je sais que ce que je fais n'échappe pas à la loi. Dans cent ans, pourquoi pas, un universitaire s'intéressera à mes écrits. Il m'est arrivé de dire intérieurement à tel ou tel professeur qui s'intéresse à nous, mais à qui nous faisons peur : " Quel dommage que vous ne viviez pas dans deux cents ans ! Quel beau sujet de thèse je serais pour vous!" J'ai déjà vu des universitaires m'envoyer tout heureux des travaux de maîtrise ou autres avec des citations de PERROT. Je sentais très bien que l'auteur avait peut-être compris sur le plan intellectuel, mais qu'il n'avait absolument rien fait de vital avec ce qui était écrit. ça me faisait une belle jambe d'être cité dans le travail ! L'auteur en était tout fier et il estimait que je devais être flatté. Vous comprenez, la récupération par les bibliothèques universitaires, ou encore pis, par les professeurs d'université, c'est vraiment la dernière chose, la dernière stérilisation, c'est la mort du phénix, mais la seconde mort, la mort contre laquelle il n'y a pas de recours. Je demande pardon aux universitaires qui pourraient m'entendre."

Etienne pERROT
extrait 19, 1982

dimanche 21 septembre 2008

MAISON DES MORTS


"Q. N'y a t'il pas, quand on sait de telles choses, j'entends par exemple le sens psychologique de maladies, le risque de tomber dans l'inhumanité, d'exercer un pouvoir ?

E.P. Bien entendu; tout réside dans l'usage qu'on fait d'une telle connaissance. Nous parlons ici d'une façon détachée d'un tel destin, nous avons peut-être l'air d'en sourire, mais nous pourrions pleurer, et nous le faisons peut-être intérieurement. Si je vous parle de ces choses légèrement, ce n'est pas parce que je les prends à la légère. J'ai eu pour amis les plus chers des êtres qui sont dans le cas du P.White. C'était mes admirations d'adolescent et d'homme jeune. Ils sont allés vers leur sort et je ne peux rien pour eux. Tenez! je vais vous citer une anecdote que j'hésitais à inclure dans mon propos. C'est un trait personnel.

J'ai commencé ma recherche par une expérience religieuse, confessionnelle, dans tout ce qu'il y a de plus banal, de plus humiliant peut-être : l'entrée dans un séminaire diocésain en Bretagne en 1940. J'avais là quelques amis de valeur. Lorsque j'ai fait ma première "sortie" pour essayer d'aller chercher ailleurs, l'un d'eux, celui que j'admirais le plus pour son intelligence , m'a écrit ceci: " Puisque maintenant tu es sorti de la maison des morts, aie une pensée pour ceux qui n'ont pas pu, pour ceux qui n'ont pas osé." L'histoire prend toute sa saveur douloureuse si je vous dis que cet homme est devenu évêque : il dirige un diocèse et, à l'occasion, il a eu les honneurs de l'acualité. Et cela , parce qu'il est resté dans la maison des morts. Aveugle conducteur d'aveugles, mort conducteur de morts, producteur de morts....

Nous, nous avons misé sur la vie, comme cet homme dont je vous ai rapporté la vision tout à l'heure .
Cette vie nous est apparue comme mort , dans la mesure où elle était d'abord une séparation d'avec le passé.
Nous pouvons évoquer à ce propos une aventure "archétypique" récente : celle de Jung quittant ses seuls amis, Freud et ses élèves, et se retrouvant seul à bâtir ses petits châteaux de cailloux sur la grève du lac de Zurich, pour chercher à tout prix un sens et un ordre dans ses productions intérieures. Et c'est à ce moment-là que Philémon est venu s'abattre sur lui comme l'aigle, et l"enseigner.

Il était sorti, lui aussi, d'une maison des morts, d'un groupe qui cultivait une othodoxie, donc une limite, donc un refus de la vie, donc une sclérose, donc une stérilité, donc une mort. il a opté lui pour la vie, et nous sommes là pour témoigner de la fécondité, de la perennité, de la propagation de cette vie, et pour y contribuer. "

Etienne PERROT
extrait cahier 17, 1982

mercredi 10 septembre 2008

LE SIGNE


"Q.Le rêve est un signe. Pour vous le signe est, sans doute, une réalité concrète qui porte un sens ?

E.P. Bien sûr ! Cela, la plupart des personnes l'écartent comme un hasard, comme étant indigne de l'attention d'un être raisonnable, rationnel. C'est irrationnel, mais nous savons maintenant que la raison n'explique pas tout. Peut-être peut-on dire que la véritable raison se moque de la raison. Nous cherchons, non pas la raison au sens de l'ère des lumières et au sens des scientistes du XIXème siècle, mais au sens profond, au sens , je dirai, cosmique. Nous cherchons l'intelligence. Dans intelligence, il y a l'intérieur : intra legere : c'est une des étymologies que l'on donne. L'étude du monde intérieur nous offre une seconde lecture des évènements extérieurs et nous habitue à cet irrationnel. C'est pour ça - c'est une question que vous pourriez me poser, alors je me la pose moi-même- que les rêves reprennent souvent des évènements du monde diurne. Pourquoi ? Parce qu'ils nous disent "Tu as vécu cela, tu n'y as pas fait attention, je te le reprojette pour que tu en voies le sens second." Et ça nous apprend à être dans la vie concrète l'oeil ouvert et attentif à cette seconde lecture. Il y a autre chose : c'est que, quand quelqu'un est centré en lui-même, il devient une sorte de champ magnétique, et c'est comme si les évènements s'ordonnaient autour de lui et comme si ces coincidences se multipliaient. Jung a donné à ce phénomène un nom savant, il l'a appelé "Synchronicité" coincidence signifiante, coincidence entre un rêve et un évènement extérieur. Le cas le plus banal c'est le rêve prémonitoire. Nous vivons dedans et souvent c'est très très drôle."


Etienne PERROT

extrait cahier 21, 1983

lundi 1 septembre 2008

CONTROLE


"Q. Une question tout à l'heure a été posée par Madame au sujet du contrôle des rêves. Je crois que c'est une chose que beaucoup d'entre nous ont eu l'occasion d'expérimenter. Pour ma part, ça m'arrive deux ou trois fois par an, c'est à dire qu'au cours d'un rêve je vois une chose illogique, une chose qui me choque à l'intérieur de mon rêve. Alors la mémoire qui me suit dans mon rêve me dit : "Je rêve, parce que ça, c'est illogique". Par exemple, dans une pièce chez moi où la cheminée est à droite, dans mon rêve je la vois à gauche. Je me dis : " C'est curieux", et je sais que je rêve parce que la cheminée est à droite. Je donne des coups à cet endroit; je me heurte au mur et ça me fait mal. Puis je conduis mon rêve et alors je regarde ce qui se passe, je constate les couleurs, j'observe que l'impression de réalité subsiste. On essaie de le prolonger, parce que c'est très amusant. Il arrive un moment , où malheureusement on se réveille.

E.P. Ma réponse à votre rêve , ce serait, Monsieur, que si vous rectifiez, si vous ramenez à la réalité concrète ce qui appartient au rêve, eh bien, vous êtes privé de la griserie de la nouveauté. On voit souvent dans les rêves un évènement qui se produit. Il est certainement important, nouveau, positif, constructif, mais " la mariée est trop belle" . Le rêveur se dit " C'est impossible , c'est un rêve!". Et il se réveille. Vous voyez ? C'est comme s'il avait voulu effacer ce qui est venu. Mais, s'il est bien accompagné, il apprendra à accepter cette nouveauté, et alors, il sera conduit vers l'imprévisible. Diriger le rêve, bon, c'est très bien. En fait, tout mon propos tend à vous montrer qu'il y a en nous une immensité et une nouveauté possibles. Cette immensité et cette nouveauté sont plus intelligentes et plus sages que nos pauvres consciences et nos pauvres raisons. Si nous voulons les contrôler, le résultat restera dans nos limites : nous échapperons à l'aventure. Certains préfèrent rester chez eux plutôt que de partir à la découverte et d'en connaître l'ivresse, c'est un choix, mais ce n'est pas le mien."

Etienne PERROT
extrait cahier 17, 1982

lundi 25 août 2008

TRANSFORMATION


"Q. Vous parlez de mort et de renaissance, mais dans le yi king, on ne parle jamais de mort et de renaissance. On parle de fin et de commencement.

E.P. Oui , mais c'est la même chose.

Q. Il s'agit d'une transformation ?

E.P. C'est intéressant , ce que vous dites. Quand , nous disons mort, il y a en nous cette réaction occidentale rationaliste, individualiste qui voit dans la mort une fin, un point final, tandis que , aussi bien le Yi King que l'exploration du monde intérieur sous quelque forme que ce soit et , en particulier, sous la forme des rêves, montre que la mort est toujours un commencement. La mort de l'un est le commencement de l'autre . Les alchimistes disaient : " La corruption de l'un est la génération de l'autre." C'est là une vision extrèmement optimiste. C'est notre phénix, ce qui meurt renaît automatiquement.
Q. Il y a tout de même un paradoxe : Vous parlez de la mort et de la renaissance et vous dites que l'homme est immortel. Pourquoi parlez-vous de sa mort et de sa renaissance puisqu'il est immortel ?
E.P. Justement , il meurt sous une forme pour naître sous une autre forme. C'est la transformation." Transformation" est le maître -mot de ce que je vous présente. Le premier livre que j'ai publié a été la traduction du Yi king et j'ai tenu à écarter le mot reçu de "mutations" qui me paraîssait trop brutal et évoquait pour moi les mutations des fonctionnaires ( j'ai été fonctionnaire), pour mettre "transformation" ce mot est le mot-clé de Jung. Puis j'ai publié "La voie de la transformation". C'est effectivement un élément extrèmement optimiste : cette transformation est toujours un renouvellement. Une vieille forme disparaît pour être changée, et cela donne quelqu'un comme le vieux Jung qui était très jeune à quatre-vingt-cinq ans, parce qu'i avait consenti à des morts, c'est à dire épousé des transformations. Il est facile de parler de ça sur une estrade, mais de le vivre, c'est plus difficile; je suis le premier à le savoir, c'est peut-être pour ça que j'ai le droit d'en parler. Le secret , c'est d'entrer pleinement dans la transformation, de ne s'accrocher à rien et de dire ce que vous aviez l'apparence de penser tout à l'heure: " C'est fini, c'est fini !" On accepte que ça soit fini, ça repartira .
Notre drame, c'est de ne pas entrer totalement et pleinement dans la mort et c'est pour ça que nous ne ressuscitons pas . Si quelqu'un consent ou est acculé par le destin à l'abandon total de ce qu'il a, eh bien, il ressortira. il ressortira renouvelé et il sera un véritable phénix.
C'est comme cela qu'on élève les phénix."

Etienne Perrot
extrait cahier19, 1982

vendredi 15 août 2008

LES VACANCES


"Q. Quelqu'un disait que dans les eaux calmes, cela va bien pour cinq minutes, mais pas pour longtemps. C'est comme les vacances.

E.P. Oui, il y a une phrase de Jung que beaucoup d'entre vous connaissent, mais qui est trop savoureuse pour que je me prive du plaisir de vous la redire. Elle est à méditer, parce que nous sommes tentés, tous tant que nous sommes , par une certaine image de la sagesse accomplie, de l'être rayonnant qui a le sourire du bouddha et qui passe son temps à distribuer les bénédictions et les paroles apaisantes. La lectrice d'une autobiographie d'un yogui disait à Jung avec admiration que cet homme avait passé quarante ans en samadhi et Jung lui répond : " Ce qu'il a dû s'ennuyer !" Le samadhi, c'est l'extase !"
Etienne Perrot
cahier19 1982

samedi 9 août 2008

LES RENCONTRES


"Q. D'après vous, la recherche de la lumière est limitée au support du rêve. Il me semble qu'avec un minimum de sensibilité on pourrait poursuivre cette recherche, en dehors du support du rêve, à travers des rencontres, avec la communion qu'on peut avoir avec d'autres personnes. Qu'en pensez-vous ?

E.P. C'est une bonne question.Le problème, c'est toujours le niveau de la communion. Cette voie que je vous montre nous fournit la possibilité d'un approfondissement qui va au-delà de l'amitié, de l'affectivité de l'individu. Dans une rencontre , bien sûr qu'il y a la dialectique, l'échange affectif, mais qui rencontre qui ? Qui est-ce que je rencontre ? Je rencontre quelqu'un qui me fait une très forte impression, mais en quoi ? Qu'est-ce que ça a touché en moi ? Le rêve vient souvent ( et là je vous parle d'expérience) nous éclairer là-dessus.

Je vous citerai un exemple très récent. J'ai un élève originaire d'un pays lointain. Il est venu en France faire des études auprès de nous. Il a lu des livres qe nous avons publiés et il souhaitait beaucoup recevoir l'enseignement du personnage important qu'est votre serviteur. Eh bien, les rêves sont venus lui montrer qu'il était là en train de s'aliéner entre les mains, ou la parole sentie comme trop éloquente, d'un maître ou d'un père, et que son problème était d'abord de chercher à être lui-même. Pour cela il devait, non pas demander un enseignement magistral gratifiant, comme on dit , mais entrer dans un dialogue beaucoup plus difficile, beaucoup moins flatteur, avec une femme. Il y a consenti de mauvaise grâce , mais c'était la seule attitude féconde.

Nous sommes rendus par cette voie extrèmement vigilants et très difficiles dans nos relations.
J'aime beaucoup les rencontres, et je me laisse facilement entraîner par l'amitié, par l'élan, etc. mais après, j'ai des retours assez redoutables. On me dit( de l'intérieur) : "Attention, tu es en train de te laisser prendre, de fondre, de fusionner, comme on dit", ou, au contraire: "Il y a là quelqu'un que tu méprises , que tu sousestimes. Attention, accorde-lui beaucoup plus d'importance !" la rectification se fait par un rêve qui vient me montrer ce qui, en moi, est touché par la rencontre. C'est faire, en somme, la radiographie de la rencontre et me dire : "Voilà ce qu'est pour toi, en réalité, sous toutes ses apparences flatteuses, ou désagréables, l'individu que tu as rencontré.

Vous me permettrez maintenant de passer à un autre aspect de ce que je viens de vous dire : c'est que la réalité qui a éclos ainsi, cette autonomie, cette liberté obtenue par l'étude de la discrimination permise par le rêve, est source de communion plus profonde. Jung disait : "On ne fait pas l'individuation ( c'est à dire ce travail intérieur) au sommet de l'Everest; l'âme vit de relations humaines." Nous sommes des individus qui tentons de parvenir à l'autonomie, mais nous savons fort bien que cette autonomie n'est pas un isolement; ce n'est pas une superbe indifférence ou une supériorité; c'est au contraire, la libération d'une source d'énergie qui demande à se déployer et à devenir un élément d'échange, de communion.
Notre liberté est une indépendance dans l'interdépendance.
Suivant la formule de Nietzsche que je vous ai citée tout à l'heure, nous sommes libres dans une nécessité toute remplie d'amour. Cette nécessité, cette dépendance, nous ne la ressentons pas uniquement par rapport aux conditions de la vie, aux conditions du monde, aux conditions de la cité, mais par rapport à notre entourage, par rapport à nos proches."

Etienne PERROT
extrait cahier 21, 1983

mercredi 30 juillet 2008

LES ENFANTS


J.C. Comment êtes-vous auprès des enfants, qui, eux aussi, sont à l'écoute de leurs rêves ? Ils n'ont pas les mêmes rêves que nous.

E.P. Si, ils ont les mêmes rêves que nous. Ils sont beaucoup plus proches que nous du monde des rêves. On peut les aider en écoutant leurs rêves, mais on a aussi à les aider autrement. Là ce que vous disiez tout à l'heure à propos du rêve -évasion peut s'appliquer aux enfants : on a à leur apprendre à mener à la fois la vie des rêves, la vie intérieure et la présence au monde extérieur. D'ailleurs les rêves les y aident aussi.
Le rêve nous renvoie vers l'extérieur.

Etienne Perrot
extrait cahier 22, 1983

mardi 22 juillet 2008

DES BANDES DESSINEES...


"Je suis au bord de la mer.Les vagues viennent vers moi et quand elles se retirent, l'écume reste et me montre des bandes dessinées.

E.P. Voilà ! Des bandes dessinées ! un de nos amis, doué d'un talent littéraire certain, se sent actuellement dirigé par l'intérieur par une succession d'indications vers la réalisation de bandes dessinées. Il vient confirmer l'orientation que donne le rêve. Nous avons à nous simplifier, nous avons à retrouver cette enfance intérieure que l'on dit être le lot des artistes, des poètes, et des amoureux, et que le christianisme, ou plus exactement son fondateur, aussi bien que Lao-Tseu, l'un des père spirituels de la Chine, donnait comme attribut essentiel à celui qui est épris de sagesse et qui veut avoir accès au royaume des cieux, c'est à dire au royaume intérieur.

Les rêves ... bandes dessinées , il est évident qu'on pourrait en faire , non une conférence, non pas un livre, mais une bibliothèque. Et au fond .. toutes les bibliothèques du monde ne partent-elles pas, si elles veulent dire quelque chose, des expériences réalisées ou tout au moins rêvées par les êtres qui ont écrit les livres ? ne sont-elles pas à base de bandes dessinées ?

Etienne PERROT
extrait cahier18, 1982

lundi 14 juillet 2008

SATAN ?

Thomas Rowlandson Bacchanale anglaise.1770( détail)
" E.P. L'intuition de Freud était bonne. le monde de la sexualité rejeté par le christianisme s'impose ,et avec force, non pas pour que nous en restions là, mais pour que nous l'intégrions dans une conception totale de l'homme. Nous avons à réconcillier le monde chrétien, le monde d'Apollon selon Nietzche, et le monde de Dyonisos. Jung a écrit et nous le vivons constamment : " cette voie est un mystère dionysiaque." Nous réintroduisons Dionysos, la bacchanale, "l'orgie" dans le monde intérieur; ça , c'est le premier point et c'est la chose essentielle. Les rêves magnifiant le principe obscur sont nombreux et reviennent constamment. Encore récemment quelqu'un me rapportait un rêve où elle entrait dans une église, et vous savez qui distribuait la communion ? Allez ! N'ayez pas peur , allez-y au plus fort !

J.C . Non, non, je ne veux pas aller au plus fort, vous allez encore me surprendre.

E.P. Eh bien, c'était Satan !

J.C. je m'y attendais

E.P. Est-ce que nous devenons sataniques pour autant ? mais non!
Cette angoisse qui est en nous _ et c'est là qu'était la vision juste de Freud _ cette angoisse, c'est d'abord le monde instinctuel que le christianisme n'a pas accueilli et qui revient dans les rêves."

Etienne PERROT
extrait cahier 21, 1983

vendredi 11 juillet 2008

DANSEURS......

La valse , Camille claudel

"Q. Est-ce que la vie est sérieuse à votre avis ?

E.P. C'est un grand jeu. Les hindous voient la création comme la danse de shiva, nous sommes des danseurs. le monde intérieur nous permet de faire de cette marche prosaïque qu'est la vie une danse perpétuelle, parce qu'à chaque instant et dans chaque situation elle nous fournit des réponses imprévues. Je vais vous citer le cas d'un de nos amis qui est un élève de ma femme. Il est chef d'entreprise. il est venu pour des difficultés personnelles. Il s'est trouvé placé dans une situation dramatique avec des procès où il était impliqué avec des gens pour qui il était sous-traitant, etc. Pour se débrouiller dans ce maquis il a pris le parti de se fier aux réponses d'un vieux livre de sagesse qui est l'équivalent du monde des rêves et qui occupe une grande place dans notre univers dont Jung a été pour nous le révélateur, qui est Le Livre des transformations, le Yi King. Cet homme a fondé sa conduite sur le yi King. Ses avocats étaient complètement désarçonnés. Quand à ses adversaires, ils se disaient : " Mais voyons, quel jeu joue -t'il ? Ce type est formidable, il fait des choses absolument impensables, il a certainement un secret, c'était de se fier au Yi King. le Yi King lui disait: "avance", quand on croyait qu'il fallait reculer, "recule" quand on croyait qu'il fallait avancer et il s'est tiré d'une situation extrêmement épineuse sans y laisser de plumes. "
Etienne PERROT
extrait cahier 23, 1983

mercredi 9 juillet 2008

Etienne PERROT , l'Ange..... et le tubercule !!!

Et l'ange apparaît à Baalam .....Gustave Doré Asmodeus, Baalam et Astaroth, Félix LABISSE, 1975

Carlo di Braccesco, Détail of the annunciation

"Nous sommes un petit groupe d'amis,mon épouse est là, tous assis autour d'une table au 1er étage d'une maison. Etienne Perrot est avec nous, tout d'abord debout, il nous parle. J'essaye de comprendre ce qu'il dit mais avec difficulté. Je me dis qu'il a une grande érudition que je n'ai pas.Puis , il est assis en face de moi. Je touche son genou pour m'assurer qu'il est bien là réellement, ce qui est le cas! Je lui dis, tu sais , je ne suis plus avec C. (mon interprète de rêve). Il me répond qu'il le sait et ne fait pas de commentaire,comme si ce n'était pas un problème. Il me demande s'il m'a donné un livre, dont le titre est "la femme" et l'auteur "Lionnel". Je lui dis que non, il me dit qu'il me le donnera.Il parle alors de 3 temps dans la semaine, dont un fait pour se reposer. Je lui demande si là où il est il y a un temps pour se reposer aussi.Il répond que ça n'a rien à voir.Puis il nous dit au-revoir, serrant la main de certains.

Il se replie sur lui-même pour prendre son élan, se lance en arrière, fait 2 pirouettes et traverse le plafond, mais n'arrive pas complètement a passer.
Son corps fait presque le double du corps humain et bien qu'il n'ait pas d'aile, on dirait vraiment le corps d'un Ange. C'est impressionnant. Il reste les jambes à passer et à l'aide de ses bras il tente de se hisser sur le plancher du plafond. Il y a comme une matière visqueuse blanche, comme de la peinture ou de la colle dans le plancher. Pour finir, il retombe. On se redit au-revoir et je lui fais une salutation à l'orientale, mains jointes. Son 2è saut est tout aussi pénible, j'essaie de l'aider en le poussant par les pieds. Puis ça passe et il disparait. Je fais remarquer qu'il est peut-être resté trop longtemps avec nous sur terre et que ça l'a épuisé ou qu'on lui a prit trop d'énergie."

Dans la nouvelle rubrique " les amis d'Etienne Perrot parlent de lui ".
Rêve communiqué par Virgilou , ami d'Etienne PERROT


lundi 7 juillet 2008

SUR UN BANC.....

Hosein Naggâsh , Raphael and the fish, c.1590

" Je me trouvais assis sur un banc du hall de la Sorbonne auprès de ma femme et portais sur mes genoux une poupée de son qui devenait en fait un oreiller. J'y écrivais cette phrase:

" SI VOUS NE DEVENEZ SEMBLABLE A CE PETIT ENFANT.VOUS ETES CONDAMNE A NE RIEN SAVOIR ."
Alors que je me demandais si j'allais entamer une harangue révolutionnaire sur ce thème et achever de faire s'écrouler la vénérable bâtisse universitaire, un jeune homme très digne , du type " jeune cadre " surgissait soudain devant moi .
Il s'inclinait en souriant, s'étonnait du peu d'écho de nos activités et me lançait dans un souffle : "La Fontaine de Pierre ? Mais c'est une famille d'anges !"

Je m'éveillais( toujours à l'intérieur du rêve) en bondissant, tels Tobie père et fils quand Raphael, leur ayant révélé son identité, prend son vol, et je m'écriais : "Mais c'est un ange !"


Cela se passait en 1973. Les évènements nous ont fait mesurer depuis la puissance et la fécondité de la "bénédiction" que nous avions reçu alors."


Etienne PERROT

extrait cahier 15 , 1981

vendredi 27 juin 2008

L'ESSENCE DE L'ALCHIMIE


P.G. Mais l'alchimie n'est plus ce qu'elle était.

E.P. Si, c'est seulement que, aujourd'hui, l'essence de l'alchimie peut-être révélée. Ce qui était présenté de façon obscure dans les grimoires et dont les auteurs ne savaient pas exactement toujours ce que cela signifiait, s'éclaire maintenant. J'ai cherché dans l'alchimie la voie occidentale de réalisation, après avoir fait le voyage d'Orient, comme beaucoup, pendant 15 ans. Je me suis dit : " il y a quelque chose en occident et c'est l'alchimie." Je ne savais pas du tout ce que c'était.

Et un jour, par hasard, je suis tombé sur un livre en anglais d'un psychologue, C.G.Jung, qui était ,dans la traduction anglaise, Psychology and Alchemy. Ce livre a décidé de ma vie. Je me suis dit : "ça y est, c'est extraordinaire, un psychanalyste connu a retrouvé le secret des anciens adeptes." Cela me paraissait incroyable, j'ai mis cinq ans, six ans peut-être à me persuader que l'incroyable était vrai. Le dernier voile est tombé quand j'ai lu l'autobiographie de Jung, qui est le récit d'une recherche déterminé par les rêves. il a été propulsé par les rêves vers l'alchimie. Et là, il a réalisé que ce qu'il cherchait était décrit dans les anciens grimoires sous des noms divers : la pierre philosophale, le soleil terrestre, le petit dieu, le dieu terrestre, l'homme total, etc...

A partir du moment où je suis entré là-dedans, les rêves sont venus en moi aussi, j'ai eu des rêves alchimiques. Et puis un beau jour, j'ai été obligé de faire passer à l'extérieur ce qui m'habitait, et dont j'étais en train de crever. Je suis devenu le traducteur de Jung....

Etienne PERROT
extrait cahier 24, 1983

lundi 23 juin 2008

Servir les autres ...


J.C.Servir les autres ?


E.P. Servir les autres dans la mesure où c'est nécessité de l'intérieur, du centre, là servir les autres, c'est la vie. Parce que je peux également me sentir pris par une mission humanitaire et partir à la conversion des autres. Mais qui désire ? Est-ce que c'est le moi, où est-ce que c'est le dieu en moi ? Débat difficile, il faut scruter attentivement les choses. Je peux décider de ne rien faire et la voix intérieure, le centre peut me dire que c'est la meilleure manière de servir l'humanité .
Etienne PERROT
extrait cahier 23, 1983

dimanche 15 juin 2008

UN DESTIN ......


" J.C. Il y a quelque chose de plus important que tout cela : peut-on passer à côté d' un destin ?

E.P. On peut éluder un destin , je crois. Mais alors vous savez ce qui se passe ? C'est que le destin vous rattrape par derrière. On voit des êtres qui meurent d'avoir refusé un destin. Et peut-être cela recommencera dans une autre vie. Vous savez, je ne "crois" pas à la métampsychose, je crois à rien du tout , mais je vois dans les rêves venir des images qui traitent des phénomènes de ce genre. Il y a une continuité d'existence au-delà des individus.

J.C. Vous pensez que les choses sont écrites

E.P. Quelque part , oui. Naturellement c'est écrit, mais dans un sens extrèmement subtil. la liberté existe et le destin existe. si nous disons : "On peut refuser un destin", ça , c'est la liberté. Mais je crois que la vraie liberté, c'est d'épouser le destin. Et à ce moment là on est libre. Pourquoi ? Là , je vous demande un effort d'attention : je vais m'élever vers les sommets. Qu'est-ce que le destin ? C'est la volonté du Tout. Si j'efface ma propre volonté et si j'épouse la volonté du Tout, je deviens totalement nécessité, totalement dépendant. Mais le Tout n'est limité que par lui-même ; donc il est libre, donc j'épouse la liberté, donc je suis libre. La libération, c'est d'épouser le destin ! Les anciens disaient _ vous avez cela gravé, je crois sur la façade de l'hôtel de Cluny _ : "Servir Dieu c'est la liberté." ( servire Deo libertas). Si vous remplacez Dieu par la vie ou le destin , c'est la même chose ."
Etienne PERROT
extrait cahier 23, 1983

jeudi 5 juin 2008

NOUS FAISONS CONFIANCE


E.P. : On nous dit dans les milieux psychologiques que nous donnons trop d'importance à l'aspect religieux, "mystique"( c'est le mot terrible !). Quand vous avez dit "mystique", vous avez accablé Jung ! Jung est un fils de pasteur. Il a vu son père mourir de ce qu'il avait perdu la foi. Il était dans sa chambre de jeune homme et entendait son père de l'autre côté de la cloison qui invoquait son Dieu en lui demandant de se révéler à lui. Jung était bouleversé. Ca n'empêchait sans doute pas le père d'aller faire le sermon le dimanche au temple, sermon auquel il ne croyait pas. Jung lui a voulu autre faire autre chose, on peut dire qu'il a retrouvé une foi, il a retrouvé tous les grands symboles. Il a déclaré à l'un de ses interlocuteurs : " Au fond, je suis venu pour rappeler aux chrétiens ce qu'est la rédemption, ce qu'est la résurrection". En dehors de tout contexte dogmatique naturellement : c'est dans l'âme !

Je vous ai parlé tout à l'heure d'entrer dans l'aventure. C'est cela la résurrection : c'est à la fois la mort, puisqu'on meurt au monde antérieur, on accepte l'immolation et on s'en remet à la vie qui, peut-être , est divine si on veut y mettre cette épithète. Et c'est une résurrection parce qu'on fait confiance à la vie pour qu'elle vous transporte ailleurs. C'est ce que dit Jung : on parle du saint -esprit, mais au fond on a peur de s'exposer au vent du saint-esprit, parce qu'on ne sait pas très bien où il conduira.

Nous faisons confiance à ce que nous appelons l'inconscient. C'est un mot-piège, ça permet de faire passer les choses les plus énormes, c'est ce que les anglais appellent l'understatement. Tout le vocabulaire de Jung est de cette sorte. "L'inconscient collectif" qu'est-ce que c'est ? C'est le monde entier du symbole, le monde entier de l'art, le monde entier de l'imagerie religieuse, les imaginations vivantes du symbolisme religieux avec leur puissance de transformation, d'illumination et d'apaisement. nous acceptons de nous exposer à un bain "d'inconscient" , en sachant que c'est quelque chose de vivant, une vie qui est peut-être éternelle.

L'étiquette dogmatique qu'on nous appliquera n'a pas d'importance; l'entreprise nous permet de vivre, c'est l'essentiel. Tandis qu' à partir du moment où on se cramponne, tout se fige...
Etienne PERROT
extrait cahier 18 , 1982

dimanche 1 juin 2008

LA PEUR ....

numéro spécial mai/juin/juillet 2008!
....."La peur est une sensibilité qui se défend" ..... entre autre dans cet amas d'insultes, de raccourcis, matérialisme, rationnalisme......

Q. Est-ce que la place que vous donnez au rêve n'est pas exagérée ?

E.P. Le rêve n'est pas une fin, c'est un moyen. De toute manière, le maître, quel qu'il soit, n'est pas une fin, c'est un moyen. La fin, c'est l'épanouissement de l'individu, la libération de l'individu, c'est la libération du dieu dans l'individu. Il n'y a pas d'autre réalité que cette réalité. Et le rêve, c'est l'organe privilégié de ce maître, lorsqu'il veut établir son règne en nous, pour parler ce langage traditionnel.

Q. Il doit être très difficile de comprendre ce langage : on a besoin de quelqu'un pour l'interpréter.

E.P. Oui, Madame, c'est ça le problème. C'est pour cela que nous sommes là ( rires) Nous sommes au début de quelque chose. Cette voie des rêves, mille signes l'attestent, est en train de s'élargir et de s'ouvrir dans un nombre d'êtres de plus en plus grand. Nulle part vous ne pouvez parler des rêves sans susciter de l'intérêt , ou de la résistance, ce qui revient au même, parce que la peur est une sensibilité qui se défend. Il y a cela et puis aussi le fait qu'il y a peu d'interprètes de rêves, les représentants des écoles traitant de l'inconscient ont peur, dans la plupart des cas, de l'intensité du rêve, des implications du rêve et de la grandeur du développement auquel il mène.

Vous l'avez perçu dans mes propos de ce soir et je viens de le redire de la façon la plus claire ; il s'agit d'une réalisation qui dépasse les limites de l'individu rationnel . Il s'agit de bien autre chose que de la solution de mes problèmes, si importants soient-ils. Il s'agit du dépassement de ces problèmes en moi pour l'établissement d'une paix et d'une conscience qui excédent les limites de cet individu. Ce vers quoi cette voie des rêves nous conduit, c'est ce que nous promettent les écoles de yoga, c'est "la libération", en laissant de côté pour l'instant l'analyse de ce que ce mot recouvre. C'est une voie au sens religieux , car elle entend relier l'être à sa source profonde, sacrée, qui est ce que les enseignements religieux appelaient " l'essence divine de l'être"; cela dans notre climat actuel, il y a peu de praticiens pour en convenir. Un grand enseignement comme celui de JUNG est réduit , dans la plupart des cas, chez ceux qui se disent ses disciples. ça , j'en témoigne, non pas glorieusement , mais très douloureusement ..."

Etienne PERROT
extrait cahier 18, 1982

dimanche 25 mai 2008

L'IMPORTANT, C'EST LE SANG...

S.Tismosin, Splendor solis XVIéme siècle

Karen GULDEN: C'est important: Il ne faut pas tuer, même dans les rêves.

E.P. Il n'y a pas de mise à mort dans les rêves ? Vous n'avez jamais tué quelqu'un en rêve ? ça c'est peut-être votre problème! Les gens qui ont trop tendance à tuer dans les rêves deviennent doux comme des agneaux, c'est certain. Mais ceux qui sont doux comme des agneaux, ils deviennent des loups en rêve.

Q. C'est dangereux.

E.P. Il ne faut pas prendre au pied de la lettre tout ce qui est dit ici, nous sommes dans le domaine du symbole. Est-ce que j'ai tué quelqu'un en rêve , tout d'abord , moi ? Je n'en suis pas sûr. J'ai pourtant conscience d'avoir exécuté un certain nombre de personnes, et à commencer par moi-même, dans ma vie. C'est peut-être pour cela que je ne rêve pas que je les tue, parce que je les ai exécuté dans la réalité, moralement bien entendu, cela dispense de les exécuter physiquement. Le propos est assez sanglant ce soir. Il était appelé par l'exposé, mais c'est très important.

Claire CHENAUX. C'est très important , parce que les personnes qui tuent sont justement des personnes qui en quelque sorte ont développé une telle agressivité, une telle dose de haine quelque part, soigneusement enfouie, qui ressort dans le rêve. Il faut tuer, on ne peut même plus discuter . Je crois que pour certains vécus, ce genre de rêves est obligatoire, car ces gens là sont au delà de quelque chose qu'ils pouvaient supporter. Ce règlement sanglant est vital pour eux, mais à prendre évidemment dans le sens symbolique. C'est sanglant au sens où c'est vital. S'ils ne peuvent pas le vivre, ils développeront une maladie très grave.

E.P. Il faut toujours savoir que ces meurtres sont des immolations, des sacrifices, destinés à permettre d'intégrer, comme le disait Karen Gulden, la partie que l'on immole de la personne, en vue d'une paix et d'une réconciliation. C'est le développement de la parole alchimique que nous rapportions tout à l'heure : "la chienne d'Arménie et le chien de Corascène se sont cruellement mordus." Cet aphorisme se trouve dans l'Atalante fugitive de Michel Maier qui est une très belle collection de sentences magistrales . Dans ce même livre, il y en a une autre où il n'est plus question de morsure mais de meurtre, c'est : " le dragon tue la femme et la femme tue le dragon et tous deux sont recouverts de sang." Le commentaire donné donne bien sûr à entendre que ce qui est important, c'est le sang. Le sang c'est la substance vitale, sacrée, dont la couleur pourpre signifie l'amour. Cette étreinte mortelle du dragon et de la femme, et de la femme et du dragon, c'est pourrait-on dire, la mort d'amour qui donne naissance à l'amour pur au prix de l'immolation des individus qui sont les partenaires de l'union.
Nous pouvons nous référer encore, au-delà des achimistes médiévaux, à Zosime dont Jung a commenté les visions dans les racines de la conscience et dont j'ai parlé de mon côté de façon toute différente dans la voie de la transformation. Zosime, c'est le grand ancêtre, c'est le précurseur, le pionnier sanglant de cette voie d'une efficacité sans égale qui est celle de la mort et de l'immolation acceptées pour une résurrection. Je vous renvoie à ces textes : Zosime voit un être écorché, un autre qui a la tête tranchée , un autre qui vomit tout son sang. On lui dit alors que cet être sera transformé en homme d'argent et en femme d'or, après le temps voulu. Il ne faut pas oublier, à travers toutes ces péripéties sanglantes, que le but poursuivi, c'est l'or dont il était question tout à l'heure. D'ailleurs ces deux aspects se rencontraient admiralement dans ce rêve si bref où le personnage déclarait : " Mon nom est Aime-mort." Je suis Aime-mort pour l'or, parce que j'aime l'or."

Etienne PERROT
extrait cahier 21 , 1983

dimanche 18 mai 2008

LA CHIENNE D'ARMENIE ET LE CHIEN DE CORASCENE

photo : http://www.waliboo.com/dossier-photos/chienvschiens.jpg

Ce matin, quelqu'un m'a appelé pour me confier un rêve reçu cette nuit.
Cette personne m'avait vu et entendu en rêve parler dans cette salle. Elle se faisait la réflexion que j'aurais dû mettre l'accent sur l'aspect des oppositions dans l'amour , en reprennant une image alchimique: " La chienne d'Arménie et le chien de Corascène se sont cruellement mordus"

L'amour est sanglant, l'amour implique des mises au point, ces rectifications auxquelles faisait allusion le rêve de l'aman. Capitulation certes, mais capitulation dans la mesure où cela m'est demandé : à d'autres moments, la révolte et la contestation s'imposent. D'épreuve en épreuve, de rectification en rectification, de purification en purification, nous serons conduits- si le ciel le veut- à l'amour pur, l'amour infini, symbole et expression de la vie totalement libérée.

Ce que cela peut avoir de schématique s'éclairera par une autre lecture que je vais vous faire. Vous voyez, ce soir mon propos aura été nourri par d'autres : je vous aurais livré des documents qui sont nés dans des dialogues que je poursuis, mais qui ne proviennent pas de cette main, de cette bouche. Voici quelques jours j'ai reçu une amie, qui ce soir-là était intérieurement nouée d'une façon imprévue. Le lendemain elle m'a adressée une lettre où elle m'exposait l'état dans lequel elle se trouvait. J'ai rarement rencontré, je dois le dire, une expression aussi fidèle de l'adhésion à ce qu'il y a d'obscur en nous pour qu'en naisse une lumière plus grande, une expression plus fidèle de ce qui peut paraître un refus, mais qui est vécu pour un don plus total :

" Cet état dans lequel vous m'avez vu, je le connais bien, je le vis souvent mais, d'habitude, je choisis d'être seule dans ces moments et alors je vais jusqu'au bout. Je me laisse envahir par la haine, je savoure à la fois mon venin et ma bave de crapaud, puis je projette sur le monde mes idées noire et tout ce fiel déforme un à un les êtres qui me sont chers, ils deviennent monstrueux et j'ai mal."

C'est le phénomène que Jung appelle la projection. Mais ce qui caractérise l'attitude de la rêveuse, c'est qu'elle en est consciente. Elle sait bien qu'elle vit une épreuve, elle y adhère. C'est pourquoi la projection n'opère pas de dégâts à l'extérieur et s'achemine vers une transformation.

" Puis toute une furie négative se retourne vers moi. Je récolte la tempête que mon vent de méchanceté avait semé. Alors, après un moment de combat, j'accepte de nêtre que ce paquet de haine vicieuse, cette épave sans âme et sans trésors, abandonnée par la mer, épave rejetée sur le rivage ou bloc massif tombé au fond. C'est en tout cas le point culminant de l'épreuve. C'est à ce moment précis que du fond de moi s'élève un chant. Une vague de chaleur monte, une douceur infinie. Voilà de la lumière. Ce n'est pas ma lumière, je le sais, c'est la lumière. C'est un moment de grand prodige.
Voilà la vie. Je sais bien alors qu'il ne s'agit pas de comprendre, mais d'accueillir. Ouvrir les bras, s'abandonner. Comme c'est facile quand c'est la vie qui vient , mais quand c'est la mort ?"
Ici je commenterai moi-même : Quand c'est la mort, c'est encore plus fécond, car c'est par cette mort que se prépare la vie plénière qui est justement au-delà de notre vie, que l'on accède à cette lumière qui est au-delà de ma lumière.
On peut relever ici un parallèle précis que fournit le Yi King. C'est le dernier oracle de l'hexagramme 38, l'opposition." Isolé par l'opposition, on voit son compagnon comme un porc recouvert de boue, comme un char rempli de démons. D'abord on tend son arc contre lui, puis on dépose son arc. Ce n'est pas un brigand, il fera sa demande en son temps. Tandis qu'on marche, la pluie tombe et la fortune vient."

Etienne PERROT
extrait cahier 21, 1983

lundi 12 mai 2008

LECTURE

"Laurent Terzieff, qui a mis sa vie au service du théâtre et de la poésie, a choisi de vous lire un extrait de La voie de la transformation d'après C.G. Jung et l'alchimie, d'Etienne Perrot. Nous le remercions vivement de cette lecture inspirée et magnifique." http://www.passiondulivre.com/media/c-13719-610848278598806.mp3

Document issu de :http://www.passiondulivre.com/livre-9016-la-voie-de-la-transformation-d-apres-cg-jung-et-l-alchimie.htm

mardi 6 mai 2008

ZEN


"Qu'est-ce qu'il y a de plus Zen que les rêves ?
Qu'est-ce qu'il y a de plus propre à provoquer ce choc que l'on nomme l'illumination abrupte, le satori, que le rêve déroutant qui vous tombe dessus et qui vous laisse interdit jusqu'au moment où votre interprète, d'une phrase foudroyante ou d'un éclat de rire, vous l'a éclairé ?
C'est cela le Zen.

J'en ai eu la preuve par un rêve , d'ailleurs un rêve qui n'est pas de moi. Un jeune homme est venu me voir un jour : il préparait un diplôme de maîtrise sur le thème : "Zen et psychologie des profondeurs", il venait me voir à titre documentaire, sans vouloir s'engager. Juste avant de venir, il a eu un rêve où nous étions ensemble, vêtus de robes blanches, dans le climat Zen si vous voulez. L'un de nous trébuchait sur une pierre, il ne savait pas si c'était lui ou moi, et nous éclations tous deux de rire. je lui ai dit : " voilà, c'est un rêve Zen.

Qu'est-ce que cette pierre ?
C'est la chose incompréhensible, c'est l'imprévu du rêve. Ce rêve est venu vous montrez que le Zen est dans les rêves et que la psychologie des profondeurs telle qu'elle doit être vécue, telle que nous la pratiquons , c'est le Zen." Il m'a répondu :" Ah ! je n'y avais pas pensé."
Je ne sais pas ce qu'il a fait de son diplôme, il ne me l'a pas envoyé.
Vous savez, dans le Zen, l'illumination s'obtient parce qu'on appelle des koans, qui sont des énigmes insolubles, déroutantes, absurdes. Dieu sait si le rêve multiplie les manifestations d'absurde pour nous obliger à faire éclater le sens !
Les rêves sont des koans, ils nous conduisent au satori, à l'illumination, c'est àdire à la conscience, qui s'accompagne ici du rire."

Etienne PERROT
extrait cahier 21, 1983

jeudi 1 mai 2008

UN LANGAGE DIRECT


"EP. Le langage que je vous ai tenu a pu en surprendre certains. Pour les uns, il est vrai, il est familier. Ce sont ceux qui ont entrepris un travail intérieur ndividuel; ils sont à l'écoute de leurs songes et ils recueillent des symboles qu'ils ont appris à goûter, à expliciter, pour autant qu'on peut expliciter un symbole, si bien qu'ils peuvent recevoir le langage symbolique, direct, qui est parlé ici. Quand aux autres, qui viennent pour la première fois participer à nos travaux, ils peuvent avoir le sentiment d'un vocabulaire et d'un monde hermétiques, c'est le cas de le dire , et donc réservé à des initiés. En fait, c'est à la fois vrai et inexact. L'initiation qui est demandée pour recevoir ce langage et l'entendre c'est l'initiation que l'on se donne à soi-même. Si l'on veut se mettre à l'écoute de son intérieur et de ses songes, on verra apparaître la pierre, la fleur, l'étoile, la boue aussi, l'abîme et le reste.

Je dois le redire : si quittant le rivage de l'explication psychologique, j'ai décidé voici quelques années, et avec une vigueur et une audace croissante, de parler ce langage direct, c'est que cela fait écho à une parole qui résonne au fond d'un nombre de plus en plus grand de français, sans parler du reste du monde que je ne connais pas ou peu, à ce niveau. Les expériences renouvelées que j'ai faite à la radio m'ont permis d'atteindre un public extrèmement vaste, non seulement en France , mais dans la francophonie et aussi chez des personnes parlant français dans des pays d'autres langues. Là, j'ai constaté avec quelle intensité le fond de l'âme s'exprimait en symbole, avec quelle insistance il criait, attendant d'être écouté et de recevoir une réponse. Il y a , dans notre chaos, dans notre obscurité spirituelle quasi totale, un ordre et une lumière qui veulent s'affirmer.

Et si je le redis, ce n'est pas avec la conviction d'un prédicateur ou d'un propagandiste, mais avec la certitude d'un enfant naïf placé devant une évidence bouleversante. Les émissions de France-Inter en 1978-1979 avaient été un évènement important: je renvoie à ce sujet au livre Les rêves et la vie* que d'excellents esprits considèrent comme capital et où plus d'un puise la science sur laquelle on fonde des cours, des conférences, des séminaires sur les rêves.

Les philosophes chinoix disent, en parlant de ce que Confucius avait présenté, que c'est la voie de l"humanité et qu'il est aussi vain de vouloir faire une église ou une institution d'Etat de la voie de l'humanité que ce le serait de vouloir faire une affaire d'Etat de l'air qui est à tout le monde et qu'on a jamais songé jusqu'à présent à nationaliser, on ne peut pas accaparer le monde intérieur. Personne ne peut en faire sa propriété, persone ne peut l'exploiter. Si certes, plus d'un le fera, mais ce sera au détriment des personnes que l'on prétend aider, parce qu'on les captivera, on les réduira , on les limitera, au lieu de les élargir, au lieu de laisser la vie prendre son cours imprévisible et tout-puissant à l'intérieur de l'être."

Etienne PERROT
extrait cahier 22, 1983
*LES REVES ET LA VIE
Etienne Perrot
Editeur : Dauphin, Paris, France
Collection : La Fontaine de Pierre
Prix : 22.00 € / 144.31 F

dimanche 27 avril 2008

LE ROLE DE LA KABBALE

image extraite de transat.effisk.net/.../fregate

" Q. Qu'est-ce que vous pensez du rôle de la Kabbale ?

E.P. C'est intéressant mais ce n'est pas mon trip, vous voyez ? j'ai fait de l'hébreu, ça m'a apporté, mais, au bout d'un moment, je me suis aperçu que je pouvais me laisser prendre à ça, que je m'écartais de ce qui m'était demandé. La Kabbale, c'est pour les Kabbalistes, c'est à dire pour des juifs.

Nous sommes que nous le voulions ou non, nous sommes de culture chrétienne, la plupart d'entre nous, et même si nous sommes éloignés de cela par deux ou trois générations, ça fait partie de notre nature, nous n'y pouvons rien. Etant entendu, vous l'avez vu, que je n'entends pas vous inviter à la restauration d'un christianisme qui vous ramène tout droit à l'église, mais d'un christianisme qui soit complété par l'intégration de l'ombre, le christianisme de Merlin, si vous voulez, fils du diable et d'une religieuse. Voilà ce que je vous présente comme voie.

La Kabbale, ça peut devenir , d'après les gens que je vois, parce qu'à Paris on voit pas mal de gens qui font de l'ésotérisme, ça peut devenir un jeu très intéressant, un jeu de l'esprit qui vous absorbe et vous dessèche. Je vous parle d'expérience là encore, je ne parle pas à partir d'a priori. J'ai un grand respect pour la science, la science sacrée, quelle qu'elle soit, mais je m'aperçois qu'une science sacrée intellectuelle permet aux individus de prendre leur vol, justement de monter très haut dans les degrés d'initiation, mais leur instinct n'est pas en place."


Etienne PERROT
extrait cahier 18, 1982

dimanche 20 avril 2008

PRISE EN COMPTE DE L'ASTROLOGIE ?


" Q. Est-ce que vous prenez en compte les références astrales ?


E.P. A chacun son langage. Mon langage est celui des rêves. J'ai le plus grand respect pour l'astrologie. C'est comme si vous me demandiez si je prends en compte la musique ou la géométrie. Dans tout cela il y a un ordre. Ma spécialité, c'est "l'astrologie intérieure", comme disaient les Anciens, une astrologie dont les astres sont à l'intérieur de l'être humain.


Les astres sont assimilés aux dieux de l'antiquité et les dieux sont mis en relation avec les métaux. Les dieux sont dans le ciel et les métaux sont dans la terre. Moi je suis alchimiste : j'observe et je travaille les métaux dans la terre. Cette terre , ce n'est pas la terre vulgaire, c'est la terre philosophique. C'est notre terre, terra nostra , c'est notre terre intérieure, ce qu'on appelle aujourd'hui l'inconscient.


Le nom et l'image de la terre viennent souvent dans les rêves, et dans cette terre on trouve des métaux. Je pense à un songe récent où l'un d'entre vous avait entre les mains une boule noire, qu'on pourrait assimiler à la terre, et cette boule noire était pailletée d'or. On pourrait dire : c'est la terre de l'or. C'est la terre intérieure, la terre de l'inconscient dans laquelle apparaît cette lumière minérale que les alchimistes voulaient extraire et qu'ils appelaient de ce nom, comme ils la nommaient aussi "notre lumière", ou "la lumière d'augmentation".


En termes astrologiques et alchimistes à la fois, on pourrait dire que cet or est le soleil, qui est ici à l'intérieur de la terre, et non dans le ciel."


Etienne PERROT

extrait cahier 14 1981

lundi 14 avril 2008

UNE SOCIETE SECRETE ?

Voir vidéo : construction

Q. Quel rapprochement faites-vous entre vos recherches et celles des société secrètes, par exemple la franc-maçonnerie ?

E.P. Notre entreprise est une entreprise de réalisation individuelle. Nous n'entendons pas instaurer des hiérarchies : qui dit hiérarchie dit subordination, qui dit subordination dit manque de liberté, qui dit groupe dit instauration d'une mentalité collective ôtant à l'individu son plein épanouissement, sa spécificité, sa vérité.

Nous ne présentons pas une vérité doctrinale; nos communications de savoir ne se font pas sous forme de transmission de symboles ou de "secrets", de bouche à oreille, de rites. L'initiation que nous procurons à un être, c'est l'éveil de son être propre, sous la forme qui est appelée par lui.

D'une certaine manière, les rêves nous présentent comme des francs-maçons : nos bâtissons un édifice qui est le temple de l'homme, et nous le bâtissons librement. Dès que, chez nous, se présente l'aliénation qu'est le respect trop appuyé envers une figure humaine, il se produit un phénomène spontané, émanant de l'intérieur, qui est un rejet, qui est la destruction de l'image ainsi construite, parce qu'elle aliénait l'individu. il n'y a pas de maître ici ou plus exactement , il y a un Maître qui est au centre de chacun, qui est le secret de chacun.
Le dieu intérieur, le soi, le secret est le seul maître, et les humains sont ses serviteurs.
Pourrais-je en dire davantage ? Est-ce nécessaire ?

Nous réactualisons ( je pourrais dire cela, c'est important), nous réactualisons le symbolisme maçonnique. C'est le symbolisme alchimique.
Chez nous il est vivant, il vit de sa vie propre, autonome, imprévisible, dans les individus chez qui il choisit de se manifester. Il est bien évident que ni l'un ni l'autre des rêveurs dont je vous ai cité tout à l'heure des productions, n'a été initié et n'a eu besoin d'être initié à la terminologie et à l'imagerie d'une société secrète, mais le symbole de la pierre, et celui de l'espace sacré, du mandala, sont renés librement et d'une façon souveraine au fond de chacun d'eux. Une pareille expérience rend impossible la subordination à une société, à un groupe ésotérique quel qu'il soit.
On pourrait dire ici : "Le soleil est levé, disparaissez étoiles !"

Les étoiles , ce seraient les symboles qu'on présente sur les murs d'une loge au cérémonial et aux costumes traditionnels, bien apprêtés, bien reconstitués.
Le soleil, c'est cette force intérieure qui, ensuite s'irise de toutes les couleurs de l'arc en ciel en images diverses. L'être individuel en est le centre, il est le seul centre , ou, plus exactement, c'est en lui que se trouve le centre qui est ce soleil. L'être placé dans ce chemin intérieur est à lui seul son propre secret et sa propre société secrète.
Voilà ce que j'ai à en dire.

Etienne PERROT
extrait cahier 17, 1982

lundi 7 avril 2008

REFLECHIR AUX RELIGIONS ...

Voir vidéo: Magnificat , J.S. BACH

Q . Je rêve beaucoup, je rêve même énormément, je sais pas dormir sans rêver et j'ai eu l'occasion de lire vos deux livres et je suis entièrement d'accord, sauf sur la question de la religion. Quand on a vu à la télévision les émissions sur le cosmos, la création de la vie, j'ai l'impression qu'on ne peut plus croire en aucune religion.

E.P. Eh bien, vous ne croyez pas , Monsieur ? Moi je vous répondrai par la parole que Jung avait tenue lors d'une émission de télévision anglaise, peu de temps avant sa mort. On lui avait posé la question : "Croyez-vous en Dieu ?" et il avait répondu : "Je ne crois pas, je sais."
Il faut préciser d'ailleurs que cette réponse insolente, provocante, avait déchaîné une tempête dans l'opinion publique.

Jung a du ensuite s'expliquer... qu'il avait voulu dire qu'il avait observé des phénomènes qui le mettaient en présence d'images ou d'énergies dont la description et l'expérience paraissaient correspondre à ce que les ouvrages des religions présentaient comme des images ou des expériences de la divinité, mais que, bien entendu, il n'entendait formuler aucune affirmation dogmatique parce qu'il n'était qu'un savant, etc.
Moi , je ne suis pas un savant. Je vous l'ai dit tout à l'heure, je suis un poète, mais je sais qu'il existe des phénomènes de ce genre.

Qu'est-ce que vous voulez ? Si quelqu'un voit dans un rêve un ange lui apparaître et lui dire : " Je suis l'ange Gabriel" que voulez-vous que je lui dise, Monsieur ?
Je lui dirai peut-être " Bon vous êtes en présence d'un archétype, d'une de ces réalités qui viennent d'au-delà du moi et qui apportent à l'individu un afflux d'énergie et des enseignements qu'il peut utiliser après les avoir soigneusement interprétés..." Moi, je veux bien, mais si cette personne est dans la religion chrétienne, je lui dirai plutôt : "L'ange Gabriel vous est apparu." Pourquoi pas ? C'est pour elle plus immédiat, plus parlant que de lui dire : "un archétype s'est manifesté en vous." C'est la même chose. Vous voyez ce que je veux dire ?

Q. Quand on réfléchit aux religions, on voit que si nos civilisations ont été inspirées par elles, elles sont tout de même grandement responsables de pas mal de maux, de conflits. Il faudrait revoir la question de ce côté-là.

E.P. C'est évident, Monsieur. Nous ne prennons pas le problème au même niveau, Monsieur. Vous comprenez : les croisades, les autodafés, les persécutions, les guerres de religions....nous savons ce que c'est. Une grande partie de l'humanité est grossière, il faut bien le dire. Je ne sais pas si cela a changé depuis des siècles mais les médiévaux disaient : "La corruption du meilleur donne le pire" On peut le dire des religions. L'essence des religions, ce sont des êtres d'élection et des individus admirables. Prenons par exemple, la Madre Teresa de Calcutta, pour évoquer une figure historique indiscutée. A côté il y a tout le reste, depuis nos guerres de religions jusqu'aux guerres saintes de l'Islam. Nous ne prenons pas le phénomène religieux à ce niveau là, nous le prenons au niveau individuel, celui que nous entendons ramener au jour dans cet exposé ...

Etienne PERROT
extrait cahier 17, 1982



samedi 22 mars 2008

LE GARDIEN DU SEUIL

Image tiré de :www.orangeblog.fr/web/jsp/blog.jsp?blogID=468....

Q. Dans les traditions occidentales mystiques, on fait allusion au gardien du seuil. vous pouvez nous donner quelques précisions là-dessus ?

EP. Le gardien du seuil , Monsieur? Eh bien, il porte un nom dans le langage de la psychologie moderne, nous le connaissons tous : c'est l'angoisse. Le gardien du seuil, c'est la personnification de l'angoisse. Dans les rêves il apparaît sous de multiples formes, ces formes mêmes qui sont présentes dans les contes et dans les récits traditionnels : le dragon, l'animal féroce, le géant, la sorcière, le mage, etc... mais dans l'évolution intérieure telle que nous l'observons et la pratiquons, c'est à dire lorsqu'on doit affronter ces forces, on voit ces présences hostiles se changer progressivement en réalités secourables. Le lion ( je viens de le voir) deviendra un chien amical qui vient lécher les mains du rêveur ou de la rêveuse, etc... C'est toujours le même processus : l'intégration de l'énergie.....


Etienne PERROT

extrait cahier 17, 1982

mardi 18 mars 2008

JE NE REVE JAMAIS...


voir video: nouveau monde


"J.C (Jacques chancel). Mais Etienne Perrot, si je vous dit que "je ne rêve jamais"qu'allez-vous me répondre ?

E.P. Oui, ça, c'est la question habituelle, ou la réflexion, que nous apporte un bon tiers des personnes qui viennent nous voir pour la première fois et qui ont été adressées à nous à cause des difficultés de vie qu'elles ont.

On leur dit : " Nous allons nous pencher sur vos rêves, car vous allez y trouver une lumière et des directives pour votre vie." Elles nous répondent "Je ne rêve jamais" Et à ce moment là, vous leur dites: "Attendez , dans une semaine nous verrons ce qu'il en sera." Et normalement, un rêve est venu ( ou plusieurs rêves). On peut même dire beaucoup mieux. La personne sent très bien d'emblée l'engagement, le plongeon que représente la prise de contact avec un interprète de rêve.

Elle sent, obscurément, qu'elle va s'adresser à quelqu'un qui vit dans un autre monde que son monde habituel, monde dont elle pressent l'existence au fond d'elle même. Si bien que la démarche qui consiste à prendre contact est déjà un branchement fait sur ce monde intérieur, sur ce monde de l'inconscient, sur ce monde des rêves, et il est fréquent qu'un rêve survienne après soit la lettre, soit le coup de téléphone qu'on nous a passé. Si bien que la personne arrive avec un rêve. On vous dit :"C'est curieux je ne rêve jamais et pourtant, après vous avoir écrit, voici ce que j'ai rêvé."

Et pour nous c'est, si je puis dire, pain bénit, parce que c'est comme si un patient arrivait chez le médecin avec sous le bras sa radio qui est déjà faite. Parce que le rêve apporte de la façon la plus étonnante, et la plus paradoxale, souvent, un aperçu, une clarté sur le problème central qui n'est pas la plupart du temps ce que la personne croyait être le véritable problème".


Etienne PERROT
extrait du cahier 21, 1983

samedi 15 mars 2008

LA REALISATION DE L'ANDROGYNE


"Q : Dans la perspective de Jung, il y a l'intégration du sexe opposé.

EP :C'est vrai : la réalisation de l'androgyne. Tout cela est simple en théorie, c'est très subtil quand il faut le vivre dans la pratique. Un magnifique songe d'androgynat n'empêchera pas que l'on entre ensuite dans les tribulations de l'amour. Il faut toujours se rappeler que la réalisation intérieure se fait à un certain niveau et qu'elle laisse le jeu de la vie individuelle suivre son cours.

Le sage qui aura découvert l'aliment éternel n'en continuera pas moins à prendre son café au lait tous les matins et à avoir faim à midi. S'il peut jeûner comme Thérèse Neumann ou quelques autres, ce ne sera pas forcément à mes yeux un facteur de canonisation. Ce sont là des anomalies qui ont certes, une signification, un sens, mais qui ne peuvent être tenues comme exemplaires. S'il y a un modèle traditionnel du destin auquel nous aspirons, c'est celui du sage taoiste qui, à la fin de son itinéraire, vend des légumes au marché.

Bien sûr, il lui arrive de provoquer des choses heureuses : les arbres fleurissent sur son chemin( ce sont des synchronicités), mais c'est un homme ordinaire. D'une façon moins pittoresque et "plus spirituelle", c'est la situation du bodhisattva bouddhique qui, une fois parvenu au nirvana, c'est à dire passé, à un certain niveau de lui-même, à l'extinction du désir, revient vers l'humanité, et assume à nouveau les passions et les infirmités humaines pour pouvoir mieux aider ses frères et les conduire à la libération. Nous aspirons à une humanité vraie, à une humanité totale, et pas à un retranchement de l'humanité.

Je suis un homme. Comme dirait Marie-Louise Von Franz, la culture de l'anima affine chez l'homme une certaine sensibilité, une certaine intuition, le rend sans doute différent dans les relations avec le sexe opposé, et il en est de même, réciproquement , pour la femme, grâce à la culture de l'animus, de l'homme intérieur.

Mais l'homme reste homme et la femme reste femme, même si l'un et l'autre ont des rêves d'androgynat, et si cette réalisation intérieure leur permet de résoudre de façon imprévue, à un moment donné, les tensions dans lesquelles ils sont entrés dans la relation avec l'autre sexe."

Etienne PERROT
extrait cahier 14, 1981

vendredi 14 mars 2008

LA LANGUE DES OISEAUX


VOIR VIDEO : chant d'oiseau

" Il m'arrive assez souvent d'avoir devant moi des personnes dont j'interprète des rêves où il y a des énigmes extrèmement simples. C'est si simple qu'on n'y pense pas et, quand on est amené à comprendre plus d'une fois parce que le rêve lui-même nous y oblige, on se dit :" Ah, je n'avais pas pensé à celle-là !".On n'était peut-être pas encore assez "abêti", comme disait Pascal en parlant des conditions de la foi. On ne devient pas (faussement) intelligent chez nous, on s'abêtit, au sens pascalien, pour que naisse cette science gaie, joyeuse, enfantine, qui est la science des pauvres en esprit.

Cette synchronicité, ces écoutes extérieures et intérieures, ces doubles lectures, nous les apprenons donc d'abord dans les rêves. Les rêves nous apprennent à décrypter la réalité_les rêves, c'est bien connu, prennent très souvent des matériaux de la vie diurne, mais c'est pour nous apprendre à les lire autrement_ Cette lecture renferme un élément très important, qui est le décryptage des mots suivant des lois qui ne sont pas des lois causales, mais des lois phonétiques, suivant le mode de formation des calembours. C'est ce qu'on appelle "la langue des oiseaux", et c'est cela , d'une façon précise, ce que les alchimistes appelaient " la gaie science". comme me le disait un rêve, c'est là qu'est le coeur du secret ( Coran teint, souriate XXIII, "gazouillis", p191.).
Pourquoi ?

Parce que cela fait exploser le langage, et notre raison avec, mais pas d'une façon destructrice, qui nous place dans le délire, mais d'une façon qui nous livre le suc des mots, qui nous livre un sens à la voie simple et profond, situé au-delà de la raison. Et c'est une synchronicité puisque la rencontre entre la forme du mot et le sens non causal qui se révèle dans sa lecture phonétique provient d'un hasard , mais d'un hasard signifiant. Par exemple "feu" signifie en français à la fois l'élément"feu" qui détruit les formes, et puis "disparu"("feu monsieur untel"), expression qui vient du passé du verbe être : "fut, autrefois : feu.".......

Etienne PERROT
extrait cahier 16, 1981